Jours 4 à 6 :
Les Jawadhu Hills (JH) sont un vaste plateau à 450m d’altitude qui abrite 60 000 habitants répartis en 116 villages regroupés en 11 communautés tribales, les Panchayats. La Dhan Foundation n’est pas investie dans toutes mais progressivement elle le sera.
Espace à 92% boisé, les JH sont un espace qui est préservé de la surpopulation et n’a pas été urbanisé, industrialisé, rendu touristique. Cette situation privilégiée est due aux modes de vie tribale qui restent stable grâce à leur organisation sociale, la transmission de codes sociaux, culturels ancestraux. Toutefois, les habitants ne sont pas hostiles au progrès dans la mesure où les valeurs principales sont préservées. L’agriculture est quasiment la seule activité économique des villageois.
Nos activités, sur ces 3 derniers jours, nous ont permis de rencontrer un groupe de femmes dan les locaux de la Dhan à Jamunamarathur pour une présentation de toutes les préparations qu’elles cuisinent avec les différents millets cultivés. La joie exprimée lors de notre arrivée était manifeste et la fierté de nous faire gouter la quinzaine de plats proposés faisait plaisir à voir. Nous nous sommes prêtés volontiers à la dégustation au point que nous avons décidé de ne pas aller déjeuné après !!
Une longue rencontre avec ces femmes a suivi la dégustation par un échange de questions réponses dans les deux sens. Intimidées, elles ont rapidement pris de l’assurance et nous avons pu échanger sur leur métier d’agricultrice, leurs problèmes du quotidien, les évolutions de leur vie depuis une vingtaine d’années, leur vie de maman, leurs habitudes vestimentaires, etc. Très peu savent lire et écrire et dans les échanges ce sont celles qui sont allées à l’école qui s’expriment le plus souvent et qui posent les questions…
L’école est, nous le savons bien, une des conditions premières pour l’émancipation !
Nous constatons, depuis notre arrivée, que certains enfants ne vont pas à l’école.
Malgré les discours rassurants des personnels de la Dhan, nous avons quelques doutes sur la scolarisation régulière de beaucoup d’enfants ! Il est vrai que pour certains villages, les écoles sont éloignées, peu ou pas reliées par des routes praticables et peu sûres pour les filles !
L’hôpital, qui dépend de la Dhan, à Jamunamarathur, est en fait un dispensaire du 1er niveau d’accès aux soins. Un médecin, un pharmacien et deux infirmières accueillent 6 jours sur 7 de 8h00 à 19h00 les personnes qui ont besoin d’un avis médical. La bobologie est soignée sur place et si c’est plus grave, le patient est orienté vers un hôpital de 2ème niveau à 70km ou vers un autre de 3ème niveau à 90km. La notion de kilomètres à parcourir est bien différente de chez nous, les routes étant très, très sinueuses, étroites, en très mauvais état !!
Nous abordons avec le médecin son travail qui nécessite une grande disponibilité, les maladies les plus courantes comme le diabète, fléau national qui justifie pleinement la réintroduction du petit millet bien meilleur pour la santé ! Au dispensaire, il est pratiqué la vaccination, et la distribution des médicaments par le pharmacien. L’équipe médicale parcourt aussi tous les JH pour faire des campagnes de prévention contre l’alcoolisme autre fléau en Inde. Les suicides sont nombreux et les violences conjugales également mais peu évoqués par les femmes. Ces campagnes sont donc d’une grande utilité.
La Dhan intervient ainsi à tous les niveaux de la vie des villageois : accès à l’école, émancipation de la femme, accompagnement à l’agriculture, accès aux soins, prévention contre l’alcoolisme, les violences conjugales, intimement liés, apprentissage à la gestion financière de l’argent des villageois. Un cercle vertueux !
Le jour suivant nous sommes allés dans un village pour voir battre le millet, lui retirer sa coque, le dépoussiérer, le mettre en sacs. Tout se fait à la main, le travail est long car chaque graine est battue et dépoussiérée plusieurs fois. Le dos des femmes est très sollicité mais aussi celui des jeunes hommes qui portent de lourds sacs. Les hommes plus âgés sont trop usés pour pouvoir encore le faire…
Nous nous sommes également rendus sur la création d’un réservoir d’eau de pluie pour permettre aux vaches et animaux sauvages de boire toute l’année. L’impact du changement climatique sur la régularité des saisons et la pluviométrie est un sujet à chaque fois abordé par les employés de la Dhan, les villageois et les agriculteurs. Comme le montre l’excellent mémoire de Maëva Rzegoczan, étudiante en Master de géographie à l’Université d’Orléans, que vous trouverez sur notre site, la quantité des précipitations annuelles n’a pas trop varié sur une moyenne de 10 ans mais avec de longs temps de sécheresse puis des précipitations excessives qui font de nombreux dégâts. Les réservoirs, sortes de petites retenues naturelles, équilibrent ces irrégularités climatiques.
Le hasard du calendrier fait que nous sommes à la moitié du temps de la recherche Patamil. Bertrand Sajaloli, Maitre de conférence à l’Université d’Orléans, responsable de cette recherche, a organisé une conférence pour faire un bilan intermédiaire. Un énorme travail a déjà été fourni par tous les acteurs et A.S.I.E a rempli sa part avec enthousiasme et succès. Pour les deux années à venir, nous avons un programme d’actions qui est déjà prévu.
Aujourd’hui, nouvelle réunion de travail mais avec le responsable de la gestion financière des villageois. Une passionnante présentation nous a permis de mesurer le travail accompli…
Crédits Photos : Camille Gauguin